Cette nouvelle définition de la non-violence sera publiée prochainement (début 2021) dans le Dictionnaire d’anthropologie prospective, publié par l’éditeur Vrin. Je l’ai rédigée dans le cadre de mes recherches lexicologiques et sémantiques sur le mot “non-violence” qui devraient aboutir à la publication d’un ouvrage, avec le concours de l’Institut de recherche sur la Résolution Non-violente des Conflits (IRNC). Les références entre parenthèses renvoient à la bibliographie qui suit l’article. Comme toute définition, celle-ci est bien entendu sujette au débat et à l’échange constructif. Lire la suite
Archives pour la catégorie Non-violence
Après le rassemblement à la République contre le racisme et les violences policières : le pouvoir du peuple
Les images extraordinaires de la foule rassemblée place de la République samedi, alors que tout rassemblement demeure interdit, témoignent d’une aspiration profonde de la jeunesse des quartiers, et plus largement des forces vives de ce pays, à la justice, à l’égalité des droits, à la dignité, au refus du racisme, de l’intolérance, de la violence, de toutes les violences. Il a fallu d’ailleurs les images de “l’internaute 94”, spécialiste des actions cascadeuses, qui a décroché la banderole infâme de Génération identitaire, pour réaliser l’ampleur du rassemblement, minimisé par les grands médias. Ce ne sont pas 15 000 personnes, comme annoncé par la Préfecture de Paris, mais bien plus de 100 000 qui étaient pacifiquement réunies dans une même exigence de dignité contre les discriminations raciales et sociales. Lire la suite
Quelques réflexions sur la non-violence à partir de la pensée de Simone Weil
Le refus de la légitimité de la violence est au coeur de l’oeuvre de la philosophe Simone Weil (1909-1943). Chrétienne hors de l’église comme elle se définissait, elle s’est indignée contre les compromissions de l’Eglise avec la violence qui ont contribué, selon elle, à profondément dénaturer la parole du Dieu chrétien. « La vérité la plus essentielle concernant Dieu, affirme Simone Weil, c’est que Dieu est bon avant d’être puissant1« . En pactisant avec la violence, l’Eglise a fait écran à la sagesse et à la bonté de Dieu. Elle estime que si l’Eglise a pactisé avec l’empire de la force, elle le doit à la double influence de l’Ancien Testament et de l’empire romain. « Cette double souillure presque originelle, écrit-elle, explique toutes les souillures qui rendent l’histoire de l’Eglise si atroce au cours des siècles2« . Simone Weil est vivement attirée par les Cathares qui « poussèrent l’horreur de la force jusqu’à la pratique de la non-violence et jusqu’à la doctrine qui fait procéder du mal tout ce qui est du domaine de la force3« . Certes, précise-t-elle, « c’était aller loin, mais non pas plus loin que l’Evangile4« . Lire la suite
Théodore Monod et le respect de la vie, plus que jamais d’actualité pour bâtir le monde d’après…
Dans le monde d’après la période du coronavirus, il se pourrait bien que certains penseurs un peu oubliés nous aident à voir le monde autrement pour construire du neuf. Théodore Monod (1902-2000) en fait certainement partie. Biologiste, naturaliste, explorateur, spécialiste des déserts et surtout profondément humaniste, il était un partisan convaincu de la non-violence. Ami de l’orientaliste Louis Massignon et de l’écrivain malien Amadu Hampâté Bä, il était un savant qui s’impliquait vigoureusement pour la cause de la dignité humaine et du respect de l’animal. Le journaliste Roger Cans résume son engagement : « On le voyait marcher au premier rang des manifestants qui protestaient contre la bombe atomique, l’apartheid, l’exclusion. Il militait contre tout ce qui, selon lui, menace ou dégrade l’homme : la guerre, la corrida, la chasse, l’alcool, le tabac, la violence faite aux humbles. Son credo : le respect de la vie sous toutes ses formes1. » Lire la suite
9 novembre 1989 : la victoire de Gandhi sur Lénine…
Le mur de Berlin n’est pas tombé grâce à la quincaillerie militaire de l’Occident, mais grâce à la mobilisation exceptionnelle de la société civile est-allemande dans une résistance non-violente qui est allée crescendo pendant les semaines qui ont précédé ce fameux jour de novembre 1989. Le système totalitaire s’est effondré en une nuit, non pas sous les coups de boutoir d’armées démesurées, mais sous la pression pacifique du peuple qui avait décidé de reprendre en main son destin. Les mauvais esprits qui se moquaient de nous lorsque nous disions que la non-violence était l’arme la plus efficace pour résister face au pouvoir communiste en furent pour leurs frais… Lire la suite
Le Service National Universel ou comment soumettre et embrigader la jeunesse. Pour un droit à l’objection de conscience.
La phase test du Service National Universel du 17 juin au 31 juillet 2019 a apporté des éclairages tout à fait saisissants sur l’essence de ce dispositif, les valeurs qu’il véhicule, les objectifs « civiques », mais surtout militaristes qu’il vise et les pratiques qu’il met en oeuvre. Si le SNU repose pour l’instant sur le volontariat, nous savons que le pouvoir souhaite le généraliser en le rendant obligatoire pour toute la tranche 16-18 ans. Je dénonce ici une entreprise de soumission et de caporalisation de la jeunesse, ainsi qu’une volonté de militarisation des consciences par des méthodes d’un autre âge, mais en parfaite cohérence avec un pouvoir autoritaire et méprisant envers le peuple. Plus que jamais, comme pour le service militaire au temps de la conscription obligatoire, un droit à l’objection de conscience au SNU doit être reconnu, par les jeunes eux-mêmes, mais également par les familles. Lire la suite
Non-violence et décroissance : essai de convergence en quelques mots
Tout comme la décroissance, la non-violence est un processus, un chemin et non pas une finalité, encore moins un dogme. Les deux mots « non-violence » et « décroissance », que nous associons volontiers, sont des termes « négatifs » qui existent par ce à quoi ils s’opposent directement : la violence et la croissance. Ils permettent de nommer clairement la démarche de rupture engagée avec l’ordre établi, qu’il soit politique ou économique. Les deux mots expriment la décision et la volonté de sortir des logiques oppressives et mortifères qui fondent les systèmes dominants. Lire la suite
18 avril 1919, Gandhi forge le mot « non-violence », traduction de « ahimsa »
Nous sommes en février 1919. Gandhi est rentré d’Afrique du Sud depuis près de cinq ans. Il a expérimenté avec succès le satyagraha, forme de résistance civile où la désobéissance aux lois injustes tient une place centrale. Sa notoriété est déjà grande en Inde. Le gouvernement britannique envisage de promulguer les lois « Rowlatt » qui prévoient d’autoriser l’arrestation et l’emprisonnement, sans procès, des « agitateurs »; ainsi sont désignées toutes les personnes soupçonnées de porter atteinte à la sécurité de l’Etat. Pour Gandhi, ces lois remettent en cause les principes élémentaires de justice et les libertés civiques. Il estime impossible que le peuple s’y soumette. Lire la suite
A propos d’une citation faussement attribuée à Gandhi… « D’abord ils vous ignorent, ensuite il vous raillent, ensuite ils vous combattent et enfin, vous gagnez »
Dans son émission « Le vrai du faux » sur France info (27 mars), le journaliste Antoine Krempf fait remarquer que de nombreux responsables politiques utilisent une fausse citation de Gandhi. Il fait notamment référence à Nicolas Dupont Aignan qui, la veille, déclarait sur Europe 1, à propos de ses chances pour les élections européennes : « Il y a une très belle phrase de Gandhi : Au début, ils vous ignorent, ensuite ils se moquent de vous, après ils vous combattent et enfin, vous gagnez« . Visiblement fier d’enrôler le libérateur de l’Inde sous sa bannière et ne doutant pas de sa capacité à faire un bon score, il ajoutait : « J’en suis au stade où ils m’ont ignoré pendant beaucoup d’années, ils se sont moqués de moi et ils me combattent. C’est très bon signe, je le prends comme honneur ». Lire la suite
Pour la planète, le choix de la lutte non-violente
Les citoyens sont entrés en résistance et pas seulement pour des questions de pouvoir d’achat. Le mouvement des gilets jaunes traduit une aspiration à davantage de justice sociale et de participation démocratique. Dans le même temps, toute une partie de la société civile est en lutte pour défendre l’avenir de la planète, le climat, notre environnement, notre santé. Ces multiples résistances se rejoindront le 16 mars dans la « marche du siècle » qui ne sera pas un aboutissement, mais une étape supplémentaire dans la lutte pour la sortie du système dominant, économique et politique, qui a fait faillite. Ce mouvement civique doit être fermement et résolument ancré dans la non-violence, telle est l’insistance privilégiée de notre tribune qui se veut une contribution à la clarification de ce qu’est la lutte non-violente. Lire la suite